Le 26 octobre dernier, les élus de Pierre la Treiche en Meurthe et Moselle, ont inauguré leur pont rénové sur la Moselle. Ce pont, qui « fait le lien entre nos villages et au-delà », porte un nom, celui d’Évelyne Didier. Sénatrice communiste entre 2001 et 2017, elle est à l’origine de la loi « visant à répartir les responsabilités et les charges financières concernant les ouvrages d’art de rétablissement des voies », autrement appelée loi Didier. Présente lors de l’inauguration, Évelyne Didier revient sur la loi qu’elle a portée.

Le texte adopté le 7 juillet 2014 est le fruit d’un long et opiniâtre travail de conviction et de partenariat pour construire un consensus autour d’un sujet touchant les communes et les départements. Au départ, en 2009, on trouve l’alerte du maire de Vandières en Meurthe-et-Moselle qui doit faire face à une dépense qui excède ses capacités budgétaires. Ce cas est emblématique du problème de financement des ouvrages d’art de rétablissement des voies, autrement dit, les ponts construits pour rétablir une voie de communication appartenant à une collectivité territoriale interrompue par une infrastructure de transport de l’État ou de ses établissements publics (réseau routier, ferroviaire et fluvial de l’État, de SNCF Réseau ou de Voies navigables de France). Faute d’une loi claire et avec une jurisprudence constante défavorable aux communes, ces dernières doivent assurer l’entretien, la réfection et le renouvellement des voies et ouvrage d’art. Or, elles sont la plupart du temps dans l’incapacité de payer une telle facture.
Évelyne Didier réussit à obtenir du ministre des Transports de l’époque, Dominique Bussereau, la mise en place d’un groupe de travail. La sénatrice mobilise les services de l’État, les élus locaux via l’association des maires de France et l’association des départements de France et rassemble des parlementaires de tout bord. « J’ai construit ce texte avec les élus et les services dans une optique non partisane, en prenant en compte les points de vue des différents acteurs », se souvient Évelyne Didier. Après l’élection de François Hollande en 2012, le travail se poursuit avec les services de Frédéric Cuvillier, secrétaire d’État, chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Évelyne Didier défend dans sa proposition de loi un principe simple : « Celui qui décide paie ». C’est au gestionnaire qui construit l’infrastructure nouvelle de transport que revient la prise en charge des dépenses relatives à la structure de l’ouvrage. Pour ce faire, une convention doit être établie afin de préciser les modalités de répartition des charges. Fait rare, cette proposition de loi est adoptée à l’unanimité en première lecture par les deux assemblées : elle bénéficie d’un véritable consensus et d’un vote final conforme. Les collectivités se trouvent enfin protégées par une règle juste et équitable inscrite dans la loi.
Depuis, la loi sert de référence pour construire des conventions de partenariat entre l’État et les collectivités locales. Surtout, elle est une référence et point d’appui encore aujourd’hui. En effet, après le recensement en 2020 des voies et ouvrages – prévu par la loi – il apparaît que la plupart des ponts se dégradent et présentent des problèmes de circulation et de sécurité grandissants. Ainsi, en 2023 la sénatrice centriste de Côte d’Or Anne-Catherine Loisier, souligne qu’il reste beaucoup à faire pour que Voies navigables de France prenne ses responsabilités en la matière plutôt que de laisser le devenir des ponts trop souvent suspendus à son bon vouloir. Pour Évelyne Didier, c’est clair : « pour faire vivre la loi, il faut que les élus locaux s’en emparent ».